« No Nature, No Future » : notre analyse des recommandations de la Commission d'enquête sur les inondations

« No Nature, No Future » : notre analyse des recommandations de la Commission d'enquête sur les inondations

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Soumis par Laurence Drèze

En Septembre dernier, le WWF, Inter-Environnement Wallonie et Natagora lançaient un Manifeste appelé « No Nature, No Future ». Signé par des milliers de Belges, il appelait le gouvernement wallon à remettre la nature au centre de certaines décisions politiques importantes. Aujourd’hui, le Parlement a adopté ses recommandations suite à l’enquête sur les inondations dramatiques de cet été. Nous les avons analysées : elles comportent de bons éléments, mais peuvent encore être renforcées, surtout en ce qui concerne le volet agricole.

Le Parlement wallon a adopté en ce jour les 161 recommandations à destination du gouvernement wallon de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner les causes et d'évaluer la gestion des inondations de juillet 2021 en Wallonie. IEW, Natagora et le WWF ont analysé ces recommandations à la lumière des recommandations en trois volets - aménagement du territoire, agriculture et nature - émises dans le Manifeste « No Nature, No Future » . 

Nous saluons le travail d'enquête réalisé par les parlementaires ces derniers mois. Il représente une étape cruciale pour pouvoir faire face aux futurs événements climatiques extrêmes. Comme le mentionne le rapport de la Commission d'enquête, les inondations mettent en relief la nécessité de renforcer et accélérer, d’une part, la lutte contre le dérèglement climatique par la réduction des émissions de gaz à effets de serre et, d’autre part, l’adaptation de nos territoires, nos infrastructures, nos institutions, nos systèmes et notre société pour protéger la population des dérèglements climatiques en cours et à venir. 

Dans notre Manifeste, nous appelions le Gouvernement wallon à agir en mettant en place des politiques de restauration des fonctions régulatrices de la nature pour faire face aux catastrophes naturelles à venir. Au travers de ses recommandations, le Parlement wallon rejoint partiellement cet appel

Les recommandations concernant l’aménagement du territoire, ainsi que celles concernant la protection et la restauration de la nature comprennent de bons éléments. Cependant, elles gagneraient à être renforcées pour rendre à la nature ses fonctions régulatrices. 

En matière d’agriculture, nous regrettons que les recommandations qui y ayant trait n’occupent pas une plus grande place dans le rapport. Notamment en ce qui concerne le rôle des prairies permanentes.

A la lumière des trois volets du manifeste « No Nature, No Future » , nous présentons ci-dessous nos observations quant à ces recommandations - notre analyse détaillée se trouvant ici.

Volet Aménagement du territoire

Le rapport parlementaire comporte plusieurs mesures qui mettent en avant la nécessité de réduire l’artificialisation des sols. 

Cependant, la première mesure du Manifeste « No Nature, No Future », qui vise à utiliser les plans de secteurs comme levier pour réduire les surfaces à bâtir, n’est pas reprise en tant que telle. Le rapport parlementaire sur les inondations rejoint les mesures n°2 et 3 du Manifeste No Nature No Future. Celles-ci demandaient des balises contraignantes sur base desquelles les permis d’urbanisme, d’urbanisation et permis unique pourraient être délivrés ainsi que, notamment, une révision du Code de développement territorial (CoDT). Cependant, il nous semble encore falloir serrer d’un cran les recommandations du rapport parlementaire à ce sujet. Nous proposons dès lors des recommandations supplémentaires sur ces points. Notamment l’insertion d’un nouvel article dans le CoDT, qui permettrait à l'autorité compétente de refuser ou conditionner un permis pour un projet ou des installations localisées dans une zone non propice à l’artificialisation.

Volet Agriculture

En comparaison avec les recommandations du Manifeste « No Nature, No Future », le volet agriculture est le moins développé des trois dans les recommandations du Parlement wallon.


La seule référence à l'agriculture se trouve dans la recommandation n°133, qui vise à augmenter la capacité d’infiltration des sols à travers l’optimalisation prévue dans le plan stratégique de la Politique agricole commune (PAC) en matière de cultures (couverture hivernale, agroforesterie,…). Cette recommandation nous paraît très faible au vu des enjeux : il ne s'agit pas d'optimiser le plan stratégique de la PAC mais de réformer la PAC en profondeur pour promouvoir une transition vers des systèmes agricoles résilients et durables. La recommandation ne parle que des cultures, alors qu’il faut mettre l'emphase sur les prairies permanentes comme atout climatique et pour leur capacité d'infiltration des sols. Une recommandation additionnelle au rapport serait que le plan stratégique de la PAC soit revu à la lumière des risques d'inondation et des enjeux.

Agriculture

Volet Nature

Les recommandations ayant trait à la restauration des zones humides comprennent de bons éléments. Nous saluons par exemple la vision d’une approche cohérente et planifiée à l’échelle des sous-bassins versants. Mais les recommandations devraient être renforcées, notamment en ce qui concerne la gestion des cours d’eau. Les recommandations de protection de la nature et le rôle des forêts devraient être davantage précisées et mises en avant.

WWF

Les recommandations du Parlement wallon prennent en compte le rôle de la nature et de ses fonctions régulatrices. Mais il y encore de la marge pour que la nature puisse jouer pleinement son rôle face aux événements climatiques extrêmes. Protéger, gérer durablement et restaurer les écosystèmes naturels garantira une réponse efficace et adaptative aux défis climatiques, tout en assurant une sécurité alimentaire, en créant des emplois et en nous protégeant contre les crises sanitaires et les catastrophes naturelles.

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