Malgré 82 % des Belges favorables à la restauration de la nature, nos politicien·nes s’appliquent à faire échouer la loi européenne qui y veillerait

Malgré 82 % des Belges favorables à la restauration de la nature, nos politicien·nes s’appliquent à faire échouer la loi européenne qui y veillerait

Au niveau européen, il existe un plan pour donner de l’espace à la nature et à ses précieuses ressources : la loi sur la restauration de la nature. 82 % des Belges se disent en faveur de davantage de restauration de la nature. Mais en dépit de l’opinion publique, l’existence de cette loi est actuellement menacée: alors que cette loi européenne semblait validée, les partis flamands Open Vld, N-VA et CD&V continuent de vouloir la faire échouer. 

Nous appelons nos responsables politiques à assumer leur rôle à la présidence du Conseil de l’UE, et à agir en tant que facilitateur pour cette loi largement soutenue par le peuple belge. 

La loi sur la restauration de la nature, résumé des faits

Depuis sa première proposition par la Commission européenne en juin 2022, le projet de loi européenne sur la restauration de la nature a fait l'objet d'une campagne de désinformation sans précédent de la part des politicien·nes conservateurs et conservatrices. Le débat était incroyablement polarisé. Jamais la nature n'a été autant politisée, ni la science mise à mal. Pourtant, cette loi est parvenue à franchir presque toutes les étapes du processus législatif européen. En novembre 2023, les États membres, la Commission européenne et le Parlement européen sont parvenus à un compromis qui répond, entre autres, aux demandes flamandes de prendre en compte les caractéristiques régionales et les zones densément peuplées.Ce texte a été approuvé par le Parlement européen le 27 février. 

Obstacles et manœuvres  

Il ne restait plus qu’à obtenir l'approbation officielle des États membres : il s'agit en principe d'une formalité, puisque les Etats membres ont déjà donné leur feu vert en novembre 2023. Mais certains responsables politiques belges ne sont pas de cet avis... Lors des manifestations agricoles, le gouvernement flamand (composé de la N-VA, de l'Open VLD et du CD&V) a mentionné dans son accord agricole qu'il continuerait à s'opposer à la loi sur la restauration de la nature et à appeler les autres gouvernements en Belgique et dans l'UE à mettre la loi « sur pause ». Comme plus de 30 organisations l’ont déjà souligné, les problèmes fondamentaux du monde agricole ne disparaîtront pas avec l'assouplissement des règles environnementales. Qu’à cela ne tienne, la ministre flamande de l'environnement, Zuhal Demir, a même adressé une lettre au Premier ministre De Croo, moins d'une semaine avant le vote au Parlement européen, pour demander que la loi sur la restauration de la nature ne soit plus inscrite à l'ordre du jour de l'Union européenne. Plus encore, elle lui a demandé de convaincre la Commission européenne de retirer purement et simplement le projet de loi.  

Peu après l'approbation du Parlement européen, le président de l'Open-VLD, Tom Ongena, a annoncé son intention de rechercher un nombre suffisant d'États membres pour bloquer la loi sur la restauration de la nature.

Ce type de combines est sans précédent et inédit de la part du pays qui assure la présidence du Conseil de l'Union européenne. Le pays qui assure la présidence est censé agir en tant que facilitateur et intermédiaire intègre et neutre, en s'élevant au-dessus de ses propres intérêts nationaux. La présidence doit notamment faire avancer l'agenda de l'UE, élaborer une bonne législation et promouvoir la coopération entre les États membres. Le parti de notre Premier ministre et d'autres partis au gouvernement flamand ne parviennent donc pas à s’acquitter de ces tâches avec intégrité, ce qui ne donne pas une bonne image de la présidence belge. 

Les Belges veulent plus de restauration de la nature  

Le WWF-Belgique a réalisé un sondage avec iVox entre le 14 et le 19 février 2024 (soit au moment où l'actualité était dominée par les manifestations agricoles), afin de mesurer l'attitude des Belges à l'égard de la nature, des politiques liées à la nature et plus particulièrement de la loi sur la restauration de la nature. Il en ressort que 82 % des Belges sont résolument en faveur de plus de restauration de la nature. Et ce, quelle que soit leur place sur l'échiquier politique.

Les trois quarts des personnes interrogées ayant une préférence pour le Vlaams Belang souhaitent ainsi que le gouvernement consacre davantage d'efforts à la restauration de la nature. 90 % des Belges pensent que la nature est importante et apprécient les avantages qu'elle apporte à notre société, en particulier les avantages pour notre santé (78 %), les services écosystémiques que la nature remplit (70 %) et les possibilités de repos et de loisirs (66 %).   

Les questions portant sur les principes de la loi sur la restauration de la nature sont encore plus parlantes : plus de 84 % des répondant·es pensent que nos gouvernements devraient intensifier leurs efforts pour restaurer au moins 30 % de la nature terrestre et marine en mauvais état d'ici 2030, et plus de 80 % des Belges sont du même avis en ce qui concerne la restauration d'au moins 90 % de la nature terrestre et marine en mauvais état d'ici 2050.

Tourbière après restauration (Vallée du Zwarte Beek)

L'heure de la vérité pour la nature 

En boycottant la loi sur la restauration de la nature, certain·es politicien·nes vont donc à l'encontre des convictions des Belges, qu’ils soient Flamand·es, Bruxellois·es ou Wallon·nes. Nous sommes toutes et tous conscient·es que la nature est une clé essentielle pour bien vivre, avec de l'eau pure, de l'air sain, suffisamment d'espaces verts, une agriculture résiliente et des tampons face aux catastrophes climatiques. Mais plusieurs responsables politiques restent guidé·es par des intérêts autres que ceux de la population.  

Nous ne devons pas laisser faire cela, car n'oublions pas que la nature, c'est nous toutes et tous. 

Plus d’information :  

À propos de l'étude iVox : iVox a été mandaté par le WWF-Belgique pour réaliser entre le 14 et le 19 février 2024 un sondage sur les attitudes citoyennes et les politiques liées à la nature auprès de 2.000 Belges âgé·es de plus de 18 ans et représentatifs par langue, région, genre, âge et niveau d'éducation. La marge d'erreur maximale pour un échantillon de 2.000 répondant·es au sein de la population belge est de 2,08%. L'étude peut être consultée ici : https://wwf.be/fr/publication/resultats-dun-sondage-aupres-des-belges-sur-les-politiques-concernant-la-nature